Lors de la conquête française la population de la région de Collo se divisait par tribus indépendantes entre elles. Chaque tribu elle même se divisait en un nombre très varié de fractions chez lesquelles il était très difficile de dire exactement où se trouvait le pouvoir ou l'influence qui régissait les intérêts généraux. Chaque fraction, formée d'éléments d'origines diverses, chaque branche de famille se prétend égale aux autres et ne reconnaît pas une branche supérieure. Il n'y avait pas de chef proprement dit. L'esprit d'indépendance qui les séparait entre elles, agissait dans les subdivisions qui se formaient naturellement avec le temps et en produisait fréquemment d'autres.
C'est ainsi que lorsque le chef d'une nombreuse famille se trouvait en désaccord avec le chef de sa fraction, il s'en séparait avec tous les siens et fondait une nouvelle fraction qui prenait son nom.
Néanmoins dans cet état d'indépendance entre elles, les diverses branches d'une tribu se réunissaient avec un parfait accord lorsque l'une d'elles était menacée par une autre tribu. Le même intérêt les unissait dans ces circonstances et, à plus forte raison lorsque l'indépendance générale était menacée par des forces étrangères, qui envahissaient le pays. Aussi, malgré la crainte qu'inspiraient les Turcs, ils ne purent jamais gouverner la région montagneuse du littoral, et, toutes les fois qu'ils voulurent montrer des forces contre cette population, celle-ci leur opposa une vigoureuse résistance.
Achachs :
Cette tribu est située au bord de la mer. Elle a pour limite au nord, la mer; au sud, les Béni Isahak, à l'est les Ouichawa Riffia et à l'ouest les Ouled Mazouz et le territoire de Collo. Elle comprend deux fractions, renfermant trois villages:
1- Ouled Fenzer.
On trouve chez les Ouled Fenzer plusieurs sous fractions :
- Les Ouled Bou Lefrakh étaient d'anciens janissaires de la garnison de collo qui s'étaient mariés et fixés dans le pays. Les indigènes considéraient les turcs comme des oiseaux de passages et leur avaient donné ce nom de frakh ( oiseaux ).
- Ouled Abdallah ben Brahim
- Ouled el Kazeran, originaires des béni Mehenna qui font aujourd'hui partie de la commune mixte de Collo, comprennent les douars de Tokla, Kerkera, Demnia, etc...
- Ouled bou Lahas
- Ouled Chaban, originaires des Wichawa
- Ouled Boulak. Les uns prétendent qu'ils viennent de Boulak en egypte ; suivant d'autres ils sont Turcs et fils de Boulakdji ( Lakdji : pêcheur turc ).
- Ouled Mahaouda, originaires des ouleds M'hamed de Djidjelli : kabyles.
- Ouled Sâadallah
Dans ces huit fractions, toutes celles dont nous n'avons pas indiqué l'origine sont des Achachs. Ils se disent originaires de la grande tribu de ce nom dont une partie est dans la région de Sétif et une autre dans celle de Constantine, sur le territoire des Bou Renan Ben Azzedine et que leur aïeul s'appelait Abdel Hadi.
2- Ouled Makhlef.
La fraction des Ouled Makhlef renferme aussi plusieurs sous fractions qui se disent toutes descendre des Achachs
Voici la véritable origine:
- Ouled el Laoulala ( Berbères )
- Ouled Aïyech ( Achach )
- Ouled Bou Saïda ( Achach )
- Ouled el Gouaou ( Originaires du Caire )
- Ouled Gaci ( Kabyles )
- Ouled Ghalem ( Arabes ) Ils ont des liens de parenté avec les Beni Mehenna. Cette tribu bien que soumise nominalement aux Turcs, ne payait pas d'impôts.
La population des Achach est de 600 habitants. Le bétail forme la principale richesse du pays. Il comprend 100 bœufs ou vaches, 275 moutons, 550 chèvres, 16 mulets et 15 chevaux. Le sol est très accidenté et d'une fertilité moyenne. Il produit un quart de blé et les trois quarts d'orge, de fèves, de millets et de pois chiches.
Le Marabout de Sidi Achour, situé sur le sommet de la montagne, domine toute la contrée.
Beni Fergan :
Cette population, originaire des environs de Zamora, du cercle de Bordj bou Arreridj, fut à une époque assez ancienne, chassée de la montagne de Fergan qui existe dans le pays et vint s'installer sur le territoire qu'elle occupe aujourd'hui encore près de l' Oued Zhor.
Beni Ishak :
Cette population habite à l'ouest de Collo, la région montagneuse et boisée qui couronne le pic du Gouffi. D'après certaines traditions locales, elle serait d'origine juive, ainsi que le démontrerait du reste le nom de leur ancêtre Isahak et la dénomination de Souk Lihoud ( marché des juifs ) donnée par les montagnards à une magnifique nécropole mégalithique découverte par Monsieur Guelani, alors administrateur de la commune de Attia, au cours d'une excursion archéologique aux environs du Gouffi. Mais , dans l'ignorance de l'histoire et par répulsion pour ce mot de Juif, ils rejettent cette hypothèse et se disent descendant des ouled Aïssa de Djidjelli.
Aïssa, leur ancêtre, était venu dans le pays avec ses quatre fils : Kamel, Bouzian, Djamad et Ziyan. Il se transporta avec eux au Gouffi, d'où ils se dispersèrent. Les cinq fractions principales existant aujourd'hui tireraient leur nom de ces quatre fils qui ont eu la plus nombreuse descendance.
ORIGINE : Les béni ishaq à la fin de la période ottomane selon les archives françaises :
Deux fractions du Goufi et du sahel, la première habite à l’ouest de Collo et la deuxième au sud-est de Collo et toutes les deux sont d’origine commune.
Selon les propos que les français ont enregistré des bouches même des vieillards des béni ishaq : "ils sont descendant des ouled Aissa de Djidjelli et leur aïeul était venu dans la région avec quatre fils kamel, djamaa, bouziane et zidane qui représentent les cinq fractions qui en découlent, connues par les ouled kamel…etc".
Kamel et son fils Azail descendirent vers les plateaux à la recherche de meilleures conditions de vie que leur offrait, abondante, l’agriculture. Ils formaient par la suite les béni ishaq du sahel.
Selon une tradition orale et voir le nom de leur ancêtre ishaq, certains pensent que cette tribu a pratiqué le judaïsme. Concernant leur nombre et activité commerciale : c’était l’une des plus riches tribu selon le recensement français pratiquant l’apiculture et l’élevage et chaque famille possédait un cheval ce qui représente à l’échelle d’aujourd’hui : une voiture.
Reste à signaler que cette tribu n’a jamais été soumise à l’autorité turque et que sa formation remonte au treizième siècle.
Beni Mehenna :
Le fondateur de la tribu, Mehanna, serait venu des environs de Bougie. C'était un Berbère, originaire de la tribu des Aït Melloul. Il eut quatre fils : Bechiri, El Khezeri, Naïmi et Messalaoui qui furent de valeureux guerriers. Ce sont eux qui refoulèrent les Beni-Toufout, les Beni-Salah, les Beni Isahak, et les Beni Ouelbene et s'établirent sur la côte. Leurs descendants sont les Beni-Bechir, les Oulad Khezer, les Oulad Naïm et les Messalaouïa.
Cette tribu des Beni Mehanna, a essaimé à son tour : Les Beni Bechir et les Ouled Khazer, occupèrent une partie du littoral et SAINT-CHARLES et fondèrent le village d'Oued Zerga.
Beni Toufout :
Leur aïeul du nom de AbdAllah, vint s'établir aux Béni Aroun, non loin de Milah. C'était au commencement de la domination turque, au XVI° siècle. Un marché fut établi dans cet endroit par Abd Allah. Soit à cause de ce marché , soit pour toute autre raison, le gouvernement turc eut à se plaindre de lui , et envoya des janissaires qui tuèrent sept de ses fils. Quant à AbdAllah, il put se sauver avec trois de ses frères et vint se fixer aux Béni Toufout qu'il peupla. On remarque sur la montagne, au milieu des bois, à l'endroit nommé Haria di Zedma, les ruines d'une fortification romaine, construite en gros blocs de granit. Les Béni Toufout, divisés en nombreuses fractions, possèdent 70 villages et une population de 7000 habitants.
Ouled Attia :
Cette tribu est située à 40 km de l'ouest de Collo. De vastes forêts concédées couvrent la majeure partie du territoire. La population qui s'élève au chiffre de 3500 habitants est divisée en trois fractions : Ouled Djamâa, Djazia et Ziabra. Les ouled Attia, d'origine chrétienne, installés d'abord du côté du Maroc, vinrent s'établir dans le pays désert de l'oued Zhor vers l'époque des grandes luttes des dynasties berbères contre les conquérants arabes. Ils ont même conservés à ce sujet une légende assez curieuse.
Un des émirs arabes se présenta un jour dans la boutique d'un cordonnier, pour y faire quelques achats. Au moment où il allait se retirer, entra la fille du cordonnier portant le repas de son père. Sa vue excita la passion de l'émir qui donna l'ordre au cordonnier de lui préparer à l'instant un lit dans la boutique même. Le cordonnier, chrétien, converti depuis peu à la nouvelle religion des conquérants musulmans, avait sans doute moins de respect que tout autre pour ces émirs qui s'intitulaient Chérifs et descendants du prophète.
Indigné d'une pareille conduite, il saisi un tranchet et tua l'émir. La population entraînée par cet exemple, massacra les Chérifs et brûla leurs habitations. Le cordonnier fut proclamé maître du pays ( il se nommait Ibrahim ben Attia ) .
Mais les arabes, revenant en force, massacrèrent la plus part des rebelles; cependant Ibrahim ben Attia réussit à se sauver avec quelques adhérents et vint se réfugier dans les montagnes de l'Oued Zhor où habitent aujourd'hui leurs descendants.
Ouled Hamidech :
Cette tribu est située sur le bord de mer, à environ 20 km à l'ouest de Collo. Ces indigènes trouvent un salaire avantageux par les travaux de démasclage des chênes-lièges exploités par la société de la petite Kabylie, dont le centre est situé à Bessambourg. Les Ouled hamidech se disent originaires de la tribu des Béni Abbas de l'Oued Sahel.
Ouled Mazouz :
D'après les uns, les Ouled Mazouz ( fils du Chéri ) sont une fraction des Ouled Endja. Ils sont venus s'établir il y a environ un siècle,( vers 1775) sur le territoire qu'ils occupent encore aujourd'hui, sur les abords de l'Oued Cherka, à trois kilomètres environ de Collo.
D'après les autres, dans des temps reculés qu'il n'est guère possible de préciser, les Ouled Mazouz étaient une fraction des Béni Habibi du cercle de Djidjelli, où existe encore une zériba du nom des Ouled Mazouz, au pied de la montagne de Seddat. Deux fractions des ouled Mazouz ayant eu une querelle, en virent aux armes pour régler le différent, la partie a qui resta la victoire chassa l'autre.
C'est alors que les vaincus, repoussés et pourchassés, traversèrent l'Oued Guebli et vinrent se placer sous la protection des Bni Mehenna qui les installèrent entre les embouchures de l'Oued Guebli et de l'Oued Cherka, où ils sont encore. Leur soumission à la France date de 1843.
Les Ouled Mazouz n'ont pas de divisions et ne renferment qu'un seul village : la Zériba de Taleza. La superficie de leur territoire est de 310 hectares dont 211 en culture et le reste en friche, broussailles et dunes. La population des Ouled Mazouz est de 180 habitants possédant 27 gourbis, 205 moutons, 128 chèvres, 11 mulets et 27 chevaux.
Les ouled Mazouz n'ont pas de marché, ils fréquentent celui du jeudi des benni toufout, et celui du vendredi de Collo. Leur commerce consiste en bétail, peaux, laine, cire, miel, oeufs, poules etc.
Tâabna :
Le territoire de cette tribu, situé à 39 km au sud-est de Collo est traversé par les deux chemins muletiers de Collo à Philippeville et par la route provinciale de Collo à Constantine. Les Taabnas ont pour ancêtre un nommé Taaban ben Abd Allah qui quitta le Caire pour venir s'installer dans le pays encore aujourd'hui peuplé par sa tribu.
Wichawa Riffiya :
Ce nom signifie d'après l'explication donnée par les gens du pays " les chawis du littoral ". En effet, leur langage est un patois mélangé d'arabe et de berbère. Les communications sont difficiles et les relations rares d'une extrémité à l'autre de la tribu. Cette population, divisée en deux fractions : les Ouled M'rabot et les Béni Marouan.